Pour financer la santé et l’agriculture, le numéro deux des Républicains, Guillaume Peltier, propose de supprimer des jours de RTT. A condition d’augmenter les salaires.
Dans cette période troublée, la droite sociale fait son grand retour. Incitations fiscales à la relocalisation, revalorisation du travail : pour Guillaume Peltier, député du Loir-et-Cher et vice-président Les Républicains, « le patriotisme durable » apparaît comme la seule alternative au nationalisme. Afin de financer la santé et l’agriculture, le numéro deux des Républicains propose de supprimer jusqu’à cinq jours de RTT, à l’instar de ce qui a été fait après la canicule de 2003 avec la journée de solidarité. Pour lui, cette crise sanitaire marque « la fin d’un monde. » « Ce sont quarante années d’échec du mondialisme financier, couplé à la haute administration centralisée, que cette crise vient aussi solder », juge-t-il.
Comment préparer la sortie de crise sanitaire ? Ce qui est vital, c’est de mobiliser l’appareil d’État en lançant une production massive de tests pour identifier les Français immunisés. Il faut aussi organiser un débat au Parlement sur la stratégie de déconfinement, de la protection sanitaire et de la relance économique.
Se fera-t-elle en étant plus « socialement responsable »? Le temps n’est pas à la vanité ni à la division mais à l’unité. Avec Les Républicains et Christian Jacob, notre objectif est de porter ce devoir d’union sacrée mais aussi de dire la vérité aux Français. Car il n’y a pas d’unité sans vérité. Emmanuel Macron devra s’expliquer car, secrétaire général adjoint de l’Elysée dès 2012, il est donc aux responsabilités depuis huit ans : comment a-t-on pu en arriver là? Pourquoi ceux qui sont payés pour anticiper et qui reçoivent toutes les informations n’ont-ils rien vu venir? Cette crise n’est pas une crise de plus mais la fin d’un monde. Depuis des décennies, nos gouvernants nous ont vendu une société sans nation, sans frontière, sans industrie, sans agriculture, sans village… Tous ces mots ont été jetés en pâture et la mondialisation heureuse est devenue le malheur des peuples, sacrifiés sur la seule logique des profits. Ce sont donc quarante années d’échec du mondialisme financier, couplé à la haute administration centralisée, que cette crise vient aussi solder.
Votre constat est très proche de celui des Insoumis…C’est tout le contraire : notre vision s’inspire de celle du général de Gaulle comme de Nicolas Sarkozy : ‘plus le trouble est grand, plus il faut gouverner’. Il faut un électrochoc. Je salue les efforts inédits de l’Etat et des collectivités territoriale, à l’image de Gérard Larcher, des maires avec François Baroin, des départements avec Dominique Bussereau, des régions avec Renaud Muselier. Nous devons soutenir la France du travail. Avec mes collègues, j’ai déposé une proposition de loi à l’Assemblée nationale visant à faire reconnaître l’état de catastrophe sanitaire. Avec Eric Woerth, nous demandons des prêts bancaires à taux zéro. Il faudrait aussi suspendre le versement des dividendes dans les entreprises aidées par l’État, et encadrer les prix pour les biens de première nécessité. Mais cela ne suffira pas. Le gouvernement pourrait créer un Conseil national de la reconstruction (CNR)
Que faut-il faire ? Poser collectivement les fondations d’un monde meilleur. Le gouvernement pourrait créer un Conseil national de la reconstruction (CNR) composé de parlementaires de tout bord, des collectivités territoriales, d’entreprises et salariés, sur le modèle du Conseil national de la résistance, dans un esprit de concorde nationale. Première mesure du CNR : un audit complet des finances publiques. La France, c’est 1.000 milliards d’euros d’impôts et 56% de prélèvements obligatoires et pourtant, nous manquons de tout. Mais où va donc tout cet argent? Ce CNR pourrait présenter trois révolutions. D’abord, un nouveau principe politique, celui de l’Etat-nation, de l’Etat stratège. Le patriotisme économique est la clé de la reconstruction : pourquoi ne pas sanctuariser la santé et l’agriculture avec un budget dédié, financé par le don de jours de RTT? Après la canicule de 2003, les Français ont offert une journée au titre de la solidarité nationale. Compte tenu de l’urgence, pourquoi ne pas faire de même? Chacun pour tous et tous pour chacun. Il est primordial aussi que l’Europe s’empare du défi de l’autosuffisance alimentaire et sanitaire ainsi que du rétablissement de nos frontières économiques : l’avenir, c’est de produire en France et en Europe.
Vous tordez le cou aux trente-cinq heures ? Contribuer à l’effort national, en supprimant jusqu’à cinq jours de RTT, c’est poser la question légitime du temps de travail. Mais à la condition d’augmenter les salaires. Trop longtemps, la France a demandé des efforts aux mêmes : les travailleurs. Face à la rente et l’assistanat, jamais la France du travail n’a autant mérité d’être récompensée. Et la France ne se redressera que par le travail. Nous avons besoin d’une nouvelle organisation territoriale
Mais comment ? Par la baisse des charges. Ce serait la deuxième orientation du CNR : le travail vaut plus que la finance. La France ne tient debout que par l’héroïsme des humbles : soignants, caissiers, chauffeurs, éboueurs, livreurs… Ils prennent tous les risques et ne sont jamais reconnus. Nous pourrions permettre aux entreprises d’accorder jusqu’à 5.000 euros de prime totalement défiscalisée et désocialisée, avec une priorité pour tous ces héros du quotidien, les milieux de cordée qui sont en première ligne. Enfin, dernier point, nous avons besoin d’une nouvelle organisation territoriale. Méprisées, les provinces sont devenues le refuge de beaucoup. Nous devons relocaliser et rapatrier, faire de nos provinces le cœur battant de l’industrie, du tourisme, de l’agriculture. Un exemple : les circuits courts prennent leur revanche car produire au plus près apparaît comme un impératif écologique, économique, stratégique et sanitaire. Nous pourrions exonérer fiscalement toute entreprise française qui produit à l’étranger et revient en France. Supprimons aussi des impôts de production : ce CNR pourrait mettre fin à la C3S : la contribution sociale de solidarité des sociétés.
C’est le grand retour de la droite sociale ? Au-dessus des sensibilités sociales et libérales, ce qui nous rassemble chez LR, c’est l’idéal d’une France gaullienne. Entre le mondialisme financier et technocratique d’un côté, et la tentation nationaliste de l’autre, la seule alternative possible, c’est le patriotisme durable. Telle est notre vision pour la France et l’Europe.